IV. h. La politique de l'emploi

 

Pour mémoire :

PIB (Produit Intérieur Brut) en milliards de francs : 7843

SMIC (Salaire minimum interprofessionnel de croissance) horaire : 40,22 F. (1 Euro vaut 6, 559 F. actuellement)

Population active : 25.582.000

Nombre de chômeurs : 2.997.600

 

Dans son livre L'économie politique ou la maîtrise des contraintes  André Grjebine dit qu'en mettant l'accent sur le contrôle de l'inflation et l'équilibre budgétaire, les gouvernements ont régulièrement sacrifié le problème de l'emploi et du chômage de masse de longue ou moyenne durée à de faux problèmes. Nous allons essayer de résumer très brièvement la politique d'emploi qui a été suivie.

Dans un discours aux PME du 27 janvier 1997, le président de l'Assemblée Nationale, Philippe Séguin, a déclaré : "L'entreprise n'est pas comptable vis à vis de la collectivité nationale en termes d'emplois, mais en termes de richesses produites ". Une façon comme une autre d'avaliser une politique dont la plupart des Français sensibles au problème du chômage, et en particulier les chômeurs eux-mêmes, c'est-à-dire 12% de la population active, ont déjà constaté les carences. Mais si le but du président de l'Assemblée est de redimensionner la confiance que les Français ont placé ces dernières années dans les entreprises, il faut dire aussi que cette confiance, savamment entretenue par toute une série de lois et de projets, est sérieusement ébranlée depuis quelque temps par les résultats de la déréglementation. Malgré la Convention générale de protection sociale de 1991, qui instaure les congés de reconversion pour les ouvriers de moins de 45 ans, malgré aussi l'application du temps partiel dans de nombreuses entreprises, la création d'emplois de proximité, le partage du temps de travail, etc. les chiffres suivants permettent de mesurer l'ampleur des difficultés auxquelles se heurtent les gouvernements qui entendent porter remède à la crise actuelle :

- l'agriculture, comme nous l'avons vu, est passée de 3,5 millions d'actifs à 730 000;

- le secteur de l'acier, à travers une série de restructurations, est passé de 140 000 à 40 000 actifs entre 1979 et 1990;

- l'industrie automobile licencie depuis quinze ans près de 2000 personnes par an; elle ne crée de nouveaux emplois qu'à l'étranger;

- les chantiers navals et les derniers bassins de travail du Centre de la France (Le Creusot) n'ont pas su assurer la reconversion de la plupart des travailleurs;

- des secteurs entiers ont été sacrifiés sans contrepartie, comme l'électronique civile, l'informatique, les machines agricoles, une très grande partie du textile.

Dans l'ensemble, deux politiques ont été mises en œuvre. Celle des aides aux sociétés d'une part, qui a vu ces derniers temps le "saupoudrage" budgétaire des entreprises au moyen de l'argent récupéré sur les privatisations, et celle des heures de travail, de l'autre. Actuellement, une combinaison des deux est en train de voir le jour. Nous résumons ici les principales étapes de cette histoire (Sources : Le nouvel Observateur, Le Monde, Libération ) :

- 1955 : les salariés de Renault obtiennent la 3ème semaine de congés payés;

- 1956 : une loi généralise la 3ème semaine de congés payés;

- 1962 : les salariés de Renault obtiennent la 4ème semaine de congés payés;

- 1969 : généralisation de la 4ème semaine de  congés payés;

- 1982 : la durée légale hebdomadaire passe de 40 heures à 39 heures, sans baisse de salaire. La loi instaure la 5ème semaine de congés payés;

- années 1980 : la loi Delebarre puis la loi Séguin organisent l'aménagement du temps de travail. De nombreux accords d'entreprises annualisent le temps de travail, avec ou sans réduction de salaire. Suppression de l'autorisation administrative de licenciement et création des Enca (Emplois nouveaux à contrainte allégée; mais le sigle se réfère au mot "en-cas", qui désigne une chose pouvant satisfaire un besoin momentané). L'État s'engage à ne pas augmenter les charges salariales et à ne pas réduire le travail au-dessous de 39 heures;

- 1996 : la loi Robien accorde des baisses de charge aux entreprises qui réduisent d'au moins 10% le temps de travail pour embaucher ou sauver des emplois;

- juin 1998 : abolition de la loi Robien;

- 13 juin 1998 : loi Aubry. La loi "cadre" (approuvée) fixe au 1er janvier 2000 le passage aux 35 heures (2002 pour les entreprises de moins de 20 salariés). Elle laisse à la négociation le soin d'établir les modalités. Une aide structurelle est prévue jusqu'à 9.000 Francs par salarié si les entreprises bouclent leur accord avant le 30 juin 1998. Les aides deviennent ensuite dégressives. La loi "balai" (qui doit être présentée dans un deuxième temps) doit permettre, avant l'an 2000, de régler tous les points restés flous : le double Smic (Salaire minimum interprofessionnel de croissance, instauration d'un revenu mensuel minimum); les quotas autorisés sans taxation supplémentaire des heures supplémentaires; le temps de travail des cadres. L'aide structurelle qui va remplacer celles accordées jusque là tourne aux alentours de 5.000 Francs.