IX. LE SYSTÈME SCOLAIRE

 

IX.a. Présentation

L’école est obligatoire de 6 à 16 ans.

Le parcours se développe en trois degrés.

Premier degré

De deux à six ans.

École maternelle Enseignement pré-élémentaire

Facultatif

De six à onze ans.

École élémentaire CP cours préparatoire

CE 1 cours élémentaire 1èreannée

CE 2 cours élémentaire 2èmeannée

CM 1 cours moyen 1èreannée

CM 2 cours moyen 2èmeannée

 

Second degré

Premier cycle (se terminant par le Brevet des collèges) ; de onze à quatorze ans :

Enseignement secondaire

1er cycle ou Collège

Cycle d’observation avec enseignement commun Sixième

Cinquième

  Cycle d’orientation Quatrième

Troisième

 

A la fin de la troisième se présente le premier grand carrefour de l’orientation.

Le conseil de classe en tenant compte des vœux de la famille propose la poursuite des études ou le redoublement. Si les parents ne sont pas d’accord ils peuvent faire appel devant une commission ou par voie d’examen.

La famille est informée de la décision d’affectation faite en fonction des décisions d’orientation (vers une 2e de lycée ou vers un Lycée Professionnel) et des possibilités d’accueil de la carte scolaire (cette carte conditionne l’inscription d’un élève dans un établissement donné au fait qu'il habite dans son voisinage).

 

 

 

Deuxième cycle : Lycée de 15 à 17 ans :

Enseignement général et Enseignement technologique

Ce cycle prépare au baccalauréat (bac) ou au Brevet de technicien

Les études durent trois ans ; les élèves passent

les classes de :

Seconde

Première

Terminale

Au fur et à mesure qu’ils avancent les lycéens se spécialisent en choisissant des filières par ex :

l = littéraire ; es = économique et social ; s = scientifique 

Après la 2e  formation de techniciens en 2 ans ; ex de filières :

stt = sciences et technologies tertiaires ; sms = sciences médico-sociales …

Enseignement professionnel donné dans les LP (Lycée professionnel) En deux ans = BEP (brevet d’études Professionnelles)

Les meilleurs élèves le désirant peuvent accéder à une première d’adaptation pour préparer en 2 ans un BP (bac Professionnel)

En 2 ans = CAP (certificat d’aptitude professionnelle)

 

Troisième degré

Après le bac, les élèves peuvent choisir entre études courtes ou longues:

Instituts universitaires de technologie (IUT) et Sections de techniciens supérieurs (STS)

Ils permettent d’obtenir, en 2 ans, un BTS ou un DUT (Diplôme universitaire de technologie).

L’université structurée en 3 cycles

Le 1er cycle dure 2 ans et se termine par le DEUG (Diplôme d’études universitaires généralisées). Le 2ème cycle après un an par la Licence et après deux ans par la maîtrise, le 3è cycle  dure d’1 an à 5 ans (1 an=DESS ou DEA, diplôme d’études supérieures spécialisées ou avancées) un doctorat obtenu après soutenance d’une thèse.

 

Parallèlement il existe en France le système des Grandes écoles (4 ou 5 ans, elles jouissent d’une réputation de formation d’élite. Parmi les plus célèbres : l’ENA (école nationale d’administration), HEC (Hautes études commerciales…. On accède aux grandes écoles après deux ans de classes préparatoires et après concours d’admissibilité.

 

IX.b. Un peu d’histoire

 

b.1. De la Renaissance à 1880.

Avant la Révolution, l’essor de l’imprimerie et la concurrence entre catholiques et protestants facilitent l’accès au savoir. Les écoles de charité se multiplient et jouent un rôle décisif. Le peuple des villes, et plus encore celui des campagnes, est réticent face à un enseignement dont il voit davantage les coûts que l’utilité pratique. Lorsque les Jésuites sont expulsés en 1762, la reprise de leurs collèges provoque un grand débat pédagogique ; pour le clergé l’enseignement est un devoir de l’Église, pour les esprits éclairés il appartient à l’État. La Révolution pose le principe de la responsabilité de l’État en la matière.  Napoléon le restreint à l’enseignement supérieur et secondaire et laisse de côté l’instruction du peuple et des filles. Il faudra attendre la loi Guizot de 1833 pour que l’école du peuple  soit reconnue d’utilité publique : toute commune de plus de 500 habitants devra désormais entretenir une école publique. Il est prévu que chaque département ouvre une école normale s’occupant de la formation des maîtres. Sous la seconde République les maîtres sont invités à contribuer à fonder la République. Cela éveille en retour une méfiance active à leur égard de la part des conservateurs. En 1850 la loi Falloux vise à renforcer l’enseignement confessionnel. Le Second empire moins soutenu par l’église va essayer de limiter son influence. La loi Duruy développe la gratuité, favorise l’ouverture d’école pour les filles, encourage l’enseignement des adultes et la pratique de la lecture par la création de bibliothèques. La loi Falloux cristallise l’opposition entre une majorité anti-républicaine cléricale et les républicains laïcs. Les prises de position pontificales anti-républicaines font le reste.

 

 

b.2. L’école de la République.

  “ Je me suis fait un serment : entre toutes les nécessités du temps présent, entre tous les problèmes, j’en choisirai un auquel je consacrerai tout ce que j’ai d’intelligence, tout ce que j’ai d’âme, de cœur, de puissance physique et morale, c’est le problème de l’éducation du peuple. Avec l’inégalité d’éducation, je vous défie d’avoir jamais l’égalité des droits, non l’égalité théorique mais l’égalité réelle. ”  Jules Ferry, député de Paris, avril 1870.

 

La Troisième République ne conçoit pas la citoyenneté nouvelle sans une refonte du système éducatif. La souveraineté populaire passe par le développement de l’instruction. Ses trois caractéristiques : gratuite, obligatoire et laïque vont se construire plus ou moins difficilement. La gratuité sera rapidement acquise. L’obligation et la laïcité vont provoquer des débats. Pour les Républicains, obligation et laïcité sont indissociables. En classe, la prière et le catéchisme seront remplacées par la morale et l’instruction civique. Les cléricaux réagissent contre l’école “ sans Dieu ”. Dans l’esprit des Républicains, former un Républicain signifie former un esprit critique qui ne doit ni foi ni obéissance à personne. L’école du libre examen relègue les croyances dans la sphère privée. La formation des maîtres devient un enjeu capital, la République accélère la construction d’Écoles normales pour les garçons et pour les filles ; normaliens et normaliennes sont souvent des enfants d’origine modeste, rurale ; ils mènent une existence qui a fait comparer leurs écoles à des “ séminaires laïques ”. Leurs élèves, les futurs instituteurs et institutrices, pénétrés d’un esprit de corps dont la mission était l’éducation des futurs citoyens, ont été baptisés “ les hussards de la République ”. Petit à petit, le personnel va être laïcisé ; la séparation de l’église et de l’État, en 1905, provoquera une recrudescence des hostilités, cela jusqu’en 1914. L’école est obligatoire de 6 à 13 ans ; la très grande majorité des élèves s’arrêtera là. Un examen sélectif sanctionne la fin de ce parcours lourdement chargé d’apprentissages. Le “ Certif’ ”  (Certificat d’études primaires) est prestigieux, non seulement sur le marché de l’emploi. L’école pour tous renforce l’unité nationale en particulier linguistique et divulgue autoritairement une morale laïque.

La poursuite des études, l’accès au cycle secondaire reste réservé à une élite. La réussite d’une poignée de boursiers (1 sur 200) ne suffit pas à démocratiser l’ensemble. Le privilège accordé à une culture classique, répandue dans les classes aisées, est un frein supplémentaire. La connaissance du latin, puis de l’orthographe, est un bastion de la bourgeoisie.

 

1880 marque une date pour la scolarisation des filles dans le secondaire. Camille Sée favorise en effet la création des lycées de jeunes filles mais celui-ci dure cinq ans au lieu de sept et ne permet pas d’accéder à l’université. Les derniers obstacles à la parité avec les établissements masculins seront levés en 1924/25.

 

Avec la création des bourses de licence puis d’agrégation, l’étudiant moderne apparaît. Les diplômes se spécialisent. Malgré un effort  pour contrebalancer l’influence de la capitale, Paris attire encore vers 1900, près de 45% des étudiants français.

 

En 1936, la scolarité obligatoire est prolongée à 14 ans. A l’école communale, l’ambition encyclopédique se transforme en un carcan peu propice à l’innovation. Les écoles techniques  instituent un CAP en 1911, mais la formation stagne. La guerre et la pénurie d’ouvriers qualifiés débloquent la situation ; on crée des Centres d’apprentissage.

Le secondaire se décloisonne ; filles et garçons suivront désormais le même cursus et surtout le ministre Herriot y introduit la gratuité à partir de 1928.

 

b.3. L’école sous la Cinquième République 

Avec le Front populaire commence la refonte du système secondaire mais c’est la Cinquième République qui accélère la réforme. On instaure une école moyenne à laquelle tous les élèves accèdent après le primaire. En 1959 la scolarité obligatoire est portée à 16 ans. En 1963 sont créés les Collèges d’enseignement secondaire. Parallèlement se met en place la carte scolaire destinée à diriger les élèves vers l’établissement le plus proche de leur domicile. En 1975, la loi Haby parfait la structure du CES.  Avec le collège pour tous l’école primaire s’ouvre aux réformes et la mixité se généralise. L’école maternelle est plébiscitée et accueille 100% des enfants de trois ans. Les méthodes innovantes comme celle de M.Montessori y sont largement entrées, elle conjugue donc éveil de l’enfant et solution des problèmes de garde !

 

IX.c. La querelle scolaire 

La querelle scolaire opposant les tenants de l’école privée, dite “ libre ”, et de l’école publique ne s’est guère assoupie. La Quatrième République a rompu avec la tradition républicaine à travers la gestion des bourses. Cette gestion satisfait les organisations privées et indigne les Laïcs. L’installation de la Cinquième République dont la majorité est favorable à l’enseignement privé, relance le débat. La loi Debré entend mettre un terme à la querelle en continuant de financer l’école privée. Elle choisit d’instaurer des contrats avec les écoles privées ; ces dernières recevront les deniers publics si elles acceptent un contrôle de l’état sur leur fonctionnement, leurs programmes et leurs enseignants. La loi indigne les laïcs sans satisfaire les catholiques les moins accommodants qui y voient une ingérence dangereuse et la perte de “ leur caractère propre ”. Le concile Vatican II contribuera davantage à apaiser les esprits. Dans les années 70, on crée de fait un double service public où tous les établissements scolaires sont pris en charge par l’état.

Toutefois, en fonction des majorités, de gauche ou de droite, le débat rebondit.  Savary ministre socialiste, prépare une nouvelle refonte du système de l’éducation nationale. Il prend acte des transformations de la clientèle de l’école privée. Celle-ci est en effet  de moins en moins choisie pour son aspect confessionnel mais de plus en plus en tant qu’ école “ alternative ” . D’un côté elle paraît plus souple, plus ouverte aux élèves en difficultés scolaires, un moyen de contourner les orientations imposées ; de l’autre côté, elle redevient l’outil d’une sélection sociale et même indirectement ethnique, un moyen de contourner la carte scolaire. Les efforts de Savary soulèvent la méfiance des tenants de l’école “ libre ” qui se mobilisent en masse et le contraignent à retirer son projet (1984). Suit une période “ d’armistice ” ; cela jusqu’en 1994, date à laquelle le gouvernement de droite annonce une réforme de la loi Falloux, c’est au tour des oppositions laïques de se mobiliser avec la même ampleur pour protester contre la loi qui sera finalement cassée par le conseil constitutionnel. Chaque camp garde ses valeurs et reste vigilant.

 

IX.d. L’explosion scolaire 

La généralisation de l’enseignement secondaire a dépassé les prévisions ; l’état doit répondre à cette explosion. Entre 1965 et 1975, on construira un collège nouveau par jour ouvrable ! La vague continue dans les lycées surtout après qu’un ministre (J.P.Chevènement en 1985) a exprimé le vœu de conduire 80% d’une classe d’âge au bac. En 1992, le taux était de 60%. Les constructions de lycées se multiplient. Le bac ouvre l’accès à l’université qui à son tour se généralise.

 

1938 = 75.000 étudiants ; 1968 = 670.000 ; 1992 = 1,5 million ; 1995 = 2,2 millions

 

Cette augmentation est malheureusement suspectée d’être davantage une question de nombre qu’un véritable indice de démocratisation, le rôle des écoles supérieures attirant l’ “ élite ” intellectuelle (ou sociale encore une fois) est fortement mis en cause, à tel point que l’on entend régulièrement invoquer l’abolition de l’ENA (École Nationale d’Administration) formant, depuis sa création en 1945, une part importante de l’élite politique française.

IX.e. La crise de l’école 

Pendant longtemps, l’école fut considérée comme un instrument fondamental pour rétablir l’égalité des citoyens, pour recruter les élites sur une base élargie en fonction des mérites individuels. Mais dès la fin des années 60,  cette grande ambition apparaît insuffisamment atteinte. L’école,  croyant distinguer le mérite scolaire, accorde une prime décisive aux héritiers de la culture dominante : humaniste autrefois, scientifique aujourd’hui. La carte scolaire augmente les pesanteurs sociologiques.

La lutte  contre les inégalités investit désormais la pédagogie, la vitalité des sciences de l’éducation témoignent de l’importance de l’enjeu que l’école contenue de représenter dans la société. La défense de l’école passe bien sûr par la formation et la recherche pédagogique. Depuis 1991, ce sont désormais des IUFM (Instituts Universitaires de formation des maîtres) qui forment les instituteurs et assurent le renouvellement du système éducatif.

 

L’école de Jules ferry se trouve aujourd’hui mythifiée comme l’âge d’or de l’école et des valeurs de la République. Aujourd’hui surtout où l’école est devenue la cage de résonance et le révélateur des souffrances sociales, des difficultés de la société, elle dit son incapacité à  les guérir, en tout cas à elle seule.

 

Parmi les symptômes majeurs de ce mal-être scolaire,  nous pouvons citer :

·        l’explosion de colères récurrentes qui mobilisent régulièrement les élèves et le corps enseignant,

·        le débat sur la violence à l’école,

·        en 1994, 11% des jeunes ont quitté l’école sans aucune qualification,

·        les résultats des enquêtes sur l’illettrisme (6 à 8% des jeunes adultes de 18 à 25 ans ne peuvent lire que des phrases simples de 3 mots),

·        l’augmentation du chômage des jeunes : les non-diplômés ont vu passé leur nombre de 8% en 1975 à 30% en 1994 et les détenteurs d’un diplôme ont vu leur taux de chômage passé à 12% en 94,  la période d’accès à l’emploi continuant, pour eux, de s’allonger.

 

Les questions transversales soulevées par ce malaise sont aussi des enjeux électoraux. Lors de la campagne pour les élections législatives du printemps 97, le programme du Parti socialiste souligne que son objectif est “ d’abord de conforter l’école de la République, creuset de l’intégration, garantie de l’égalité des chances ”, cette déclaration s’inscrit dans une continuité des valeurs et des rôles attribués à l’institution scolaire.

Atteindre un tel objectif, largement partagé (tout au moins au niveau des déclarations) par les forces démocratiques, est ardu. L’institution scolaire est si vaste, si articulée, si chargée de traditions, de bureaucratie qu’on la compare communément à un mammouth ; quant aux jeunes en difficulté, on les dit “ en galère ”.

Dès 1981,  l’état s’est orienté vers une “ discrimination positive ” en instituant des ZEP (Zone d’Éducation Prioritaire) correspondant aux zones en difficulté (concentrées au Nord et à l’Est). Actuellement cette politique est confirmée et permet de mettre en oeuvre des actions spécifiques prenant en compte le contexte social, les problèmes se trouvant en amont de ce que l'on appelle l’ “ échec scolaire ”. L’un des objectifs majeurs est la lutte contre la ghettoïsation. Pour éviter la fuite des bons élèves vers des établissements réputés, fuite que la carte scolaire ne suffit pas (ou mal) à enrayer, les projets sont de constituer, à l’intérieur des ZEP, des pôles d’excellence capables de jouer un rôle d’entraînement positif sur leur environnement  et donc de maintenir la diversification sociale.

 

 

Parmi les projets, on trouve la nécessité de libérer les initiatives, le renforcement de l’enseignement professionnel et le soutien à l’apprentissage mais aussi une augmentation des bourses aux élèves-professeurs et la valorisation de ceux qui choisissent les classes “ difficiles ”. Pour les jeunes en galère, on voit naître les “ classes de la deuxième chance ” ou “ classes du temps choisi ” . Pour tous, on assiste à une revalorisation de l’instruction civique.

De plus, l’école se décloisonne et profite de l’engagement général en faveur de l’intégration, de la lutte contre le chômage ou contre la délinquance. Dernièrement, l’institution des emplois-jeunes a “ offert ” aux écoles 33.000 nouvelles recrues chargées de revitaliser des structures peu utilisées faute de personnel, ces jeunes jouent également un rôle intermédiaire entre le monde des adolescents et celui des adultes, deviennent des confidents et des conseillers précieux et cela pas seulement pour les problèmes étroitement scolaires. Dans le domaine de la violence, la figure de l’intermédiaire, ou mieux du médiateur de conflits, montre, elle aussi, son importance.

 

Écoles en difficulté, cette expression évoque les quartiers explosifs des banlieues  pourtant d’autres écoles se battent pour affirmer leur rôle et leur droit à exister ; il s’agit des établissements isolés dans des zones en voie de désertification.

 

Dans les divers cas, le partenariat des institutions semble un chemin pratiqué et efficace. Enfin le décloisonnement passe aussi à travers une meilleure relation entre l’école et les familles. Les familles en difficulté sont loin d’être les moins convaincues de l’importance de l’école mais là encore un médiateur est souvent précieux, ce médiateur peut d’ailleurs être simplement une personne capable de “ traduire ” la communication ; il existe en effet des zones où sur 30.000 habitants on compte plus de 30 nationalités !