II. LE SECTEUR PRIMAIRE

 

II. a. L'agriculture en France

 

La France est particulièrement attachée à son agriculture. La référence de De Gaulle sur l'ingouvernabilité des Français qui peuvent changer d'opinion comme de fromage chaque jour de l'année (365 fromages, dans les années 1960) trouve un écho inattendu dans l'ironie du chanteur Renaud qui s'en prend dans Hexagone, une chanson particulièrement cruelle mais non tout à fait dénuée de vérité, à certaines valeurs alimentaires nationales comme le camembert et le vin de Bordeaux (quoique pinard désigne n'importe quel vin):

Leur pinard et leur camembert

C'est leur seule gloire à ces tarés

De fait les différents Présidents de la République n'ont cessé de rappeler que la vocation de la France était l'agriculture. Jacques Chirac, dans un discours pour fêter le cinquantenaire de la création de la FNSEA (Fédération Nationale des Syndicats d'Exploitants Agricoles), précise l'orientation de son septennat : la politique agricole, dit-il, passe par "la modernisation et l'adaptation de la politique des structures ainsi que par la modernisation de l'organisation économique et des filières. A cette fin, j'ai demandé au gouvernement [celui d'Alain Juppé] et au ministre de l'agriculture de préparer avec vous, et de présenter l'an prochain, une loi d'orientation agricole. (...) Mes chers amis, (...) vous êtes, plus que toute autre profession, les gardiens de notre identité " (Le Monde).

Pendant la campagne présidentielle de 1995 qui oppose au deuxième tour Lionel Jospin à Jacques Chirac, le candidat socialiste précise seulement, sans s'opposer sur le reste à son adversaire, son intention de "cibler" les aides agricoles. Enfin, Valéry Giscard d'Estaing, dans son discours de Ferrara au Congrès Européen des Communes Jumelées (novembre 1998) déclare en ce qui concerne les "problèmes en suspens ": « ce sont (...) la politique agricole commune (PAC) - dont je rappelle qu'elle fait partie du pacte fondateur de l'Union européenne - et il faut savoir que lorsque nos [représentants] ont voté à l'époque en faveur du Traité de Rome, le vote a été enlevé en raison de la présence de la politique agricole commune  dans ce pacte fondateur » (transcription)…

Cependant, cette défense de l'agriculture nationale ou à vocation européenne fortement teintée de nationalisme de la part de  personnalités du monde politique, dissimule mal certaines faiblesses. L'intérêt pour l'agriculture n'est pas toujours en prise sur l'ensemble de l'économie. Pour prendre un exemple, la planification française n'a consacré à l'agriculture que le IIIe Plan, sous la forme d'un accroissement de la production des tracteurs Renault. Jacques Chirac, dans l'article précédemment cité, a peut-être mis le doigt sur une plaie qui saigne depuis longtemps en disant aux syndicats agricoles : "Une agriculture dont seule la vocation productive serait reconnue deviendrait vite un secteur économique banalisé, soumis aux lois de la concentration et de la délocalisation, qui conduirait des régions entières à la désertification ". Mais en même temps il propose "que soit conclu un nouveau pacte entre la nation et ses paysans ", où l'accent est mis cette fois non plus sur les agriculteurs, mais sur une notion - les paysans- qui évoque davantage la France d'autrefois que celle d'aujourd'hui.

C'est cette approche contradictoire pendant des années qui a déterminé la situation actuelle, si bien mise en relief par Maurice Parodi dans L'économie et la société françaises de 1945 à nos jours :

"L'agriculture, qui était encore en 1968 la "première industrie nationale" du point de vue de l'emploi, avec ses 3.125.OOO personnes actives occupées, ne comptait plus, en 1977, que 2.000.000 de personnes actives ". Depuis, la situation n'a fait que se dégrader. Pour s'éloigner de la paysannerie - à laquelle le discours chiraquien prétend rester fidèle -, fallait-il arriver à un chiffre de 731 500 actifs seulement, en 1997, dans le secteur agricole? Comment parler encore d'un grand secteur si la part de l'agriculture dans le PNB (Produit national brut) n'est plus que de 3,5%?

 

Les paysans intéressent les pouvoirs publics depuis longtemps. En 1881, au début de la IIIe République, on crée un ministère de l'agriculture avant même que l'administration ne songe à créer un ministère de l'industrie. C'est pour protéger l'agriculture de la mévente qu'on en vient, en 1892, au protectionnisme, facilité par les colonies. C'est pour assurer le financement de l'agriculture que, dès sa création, à la fin du XIXe siècle, le Crédit agricole bénéficie d'un traitement de faveur de la part de l'Etat. Il "coiffe" le réseau de ses caisses régionales par une Caisse nationale qui va devenir la première banque du pays.

Cet intérêt prolongé pour un secteur qui a fourni aux cadres politiques de la IIIe et de la IVe République leurs soutiens les plus forts, au régime de Vichy sa justification la plus profonde, et surtout aux deux guerres mondiales leur apport en hommes le plus précieux, aboutit au lendemain de la deuxième guerre à une politique de modernisation partielle dans le cadre du plan Monnet, sous l'égide du ministre socialiste François Tanguy-Prigent.

1946 est l'année, sur le plan juridique, du changement du statut du fermage. Une loi porte à 9 ans la durée minimale du bail (contrat) entre le fermier et le propriétaire. A l'expiration, ce bail est automatiquement renouvelé, sauf si le propriétaire reprend la terre pour l'exploiter à son compte ou la donner à son fils qui va l'exploiter à son tour. En cas de vente, le fermier dispose d'un droit de préemption sur tout autre acheteur. Enfin, le montant du fermage est calculé à partir des revenus des cultures et fixé par une commission mixte, composée de fermiers et de propriétaires.

Le fermage devient donc un mode de production avantageux. L'Etat favorise aussi les agriculteurs en créant après 1945 l'INRA (Institut National de la Recherche Agronomique) et les CUMA (Coopératives d'Utilisation du Matériel Agricole). Il favorise le remembrement des terres (les agriculteurs peuvent "échanger", à parité de rentabilité, leurs terrains de façon à avoir des propriétés d'un seul tenant); enfin, le taux des prêts accordés par le Crédit Agricole baisse dans la mesure où cette banque a le monopole sur les crédits accordés aux agriculteurs.

Deux types de capital : le capital foncier, qui comprend les terres et les maisons, et le capital d'exploitation, qui comprend les machines et le bétail, sont à la base de l'exploitation agricole.

Malgré la nouvelle législation,  le statut du fermage n'abolit pas le faire-valoir direct. Si le fermage occupe actuellement 60% de la Surface Agricole Utilisable (SAU), le faire-valoir direct en occupe 40%. Mais ce dernier se trouve surtout dans les exploitations inférieures à 30 hectares. Au-dessus, c'est le fermage (loyer d’une ferme) qui l'emporte. C'est pour ce dernier notamment qu'ont été faites les grandes réformes. Les exploitants directs (les propriétaires exploitants) demandent quant à eux la diminution, et même l'abolition, des droits de succession. La politique gouvernementale, tout en voulant favoriser officiellement les exploitations moyennes (autour de 20 hectares) favorise surtout les exploitations à partir de 30 hectares et les grandes exploitations. Mais cette politique a aussi favorisé certaines régions  aux dépens des autres, notamment celles qui connaissent la production céréalière et celles des betteraves à sucre. Les primes à l'arrachage qui ont été décidées dans le cadre de la PAC (Politique agricole commune) mais aussi dans un cadre parfois strictement national, ont transformé des zones agricoles comme le midi de la France en zones de désarroi agricole. L'arrachage des vignobles ou des arbres fruitiers, le faible rendement des céréales dans ces régions de plaines peu étendues, auxquels s'ajoutent le gel des oliviers et l'abandon de la culture des mûriers liée à l'industrie de la soie, ont accentué les départs vers la ville et encouragé la monoculture des prairies artificielles plantées de luzerne.

 

II. b. Les tarifs

 

Une politique de soutien des cours vient équilibrer les prix à partir des années cinquante. Après l'ONIC (Office National Interprofessionnel des Céréales), créé en 1945, l'Etat crée une série d'offices interprofessionnels: ONILAIT (lait), ONIBEV (bétail et viande), ONIVIT (vin de table, ou vin de consommation courante). En 1961 est créé le FORMA (Fonds d'Orientation et de Régularisation des Marchés Agricoles).

Entre 1961 et 1966, Edgar Pisani, ministre de l'Agriculture sous la présidence du général de Gaulle, définit une politique des structures agricoles pour permettre à la France d'aborder le marché commun dans de bonnes conditions. Cette politique sera suivie par ses successeurs, notamment Edgar Faure et Jacques Chirac (1972-1974), ce dernier sous la présidence de Georges Pompidou.

 

 

II. c. Les structures

 

A) Les structures foncières. On crée dans chaque région les SAFER (Sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural). Ces SAFER ont un droit de préemption sur les terres; elles les revendent à bas prix aux jeunes agriculteurs. Les pertes éventuelles sont couvertes par subventions budgétaires. La création de cet organisme remonte au début du boom des résidences secondaires à la campagne. Ce sont les zones semi-boisées, entre la plaine et le bois, qui font l'objet des disputes les plus âpres entre les SAFER et les citadins qui veulent y installer leur villa. Zones dont le rôle écologique n'est pas encore pensé, et le plus souvent, difficiles à remettre en culture, dans le midi notamment, car les oliviers qui les occupaient avaient subi le gel de 1956.

B) Les structures démographiques. Les agriculteurs de plus de 55 ans reçoivent une Indemnité Viagère de Départ (IVA), qui fait fonction de retraite. En revanche, les jeunes agriculteurs qui s'installent reçoivent une Dotation aux Jeunes Agriculteurs (DJA). Le but du Centre National pour l'Aménagement des Exploitations Agricoles est l'abaissement de l'âge des exploitants agricoles.

C) Les structures d'exploitation. L'Etat propose le Groupement Agricole d'exploitation en commun (GAEC) aux agriculteurs. Cette forme d'exploitation, "associe 2 à 10 personnes mettant en commun matériel et cheptel, organisant ensemble les travaux agricoles. Ses membres reçoivent un salaire fixe, complété par une part variable du bénéfice annuel de l'exploitation "(M. Baleste).

D) Les structures de commercialisation. Des Sociétés d'intérêt collectif agricole (SICA) permettent aux agriculteurs de contrôler les circuits de distribution de certains produits, comme artichauts, choux et pommes de terre. Le plus souvent, ces cultures sont des monocultures, provenant d'une spécialisation régionale (artichauts en Bretagne, dans la région de Saint Pol de Léon, choux en Alsace).

 

II. d. Produire

 

Le parc de tracteurs s'élève actuellement à environ 1.500.000 (la production de matériel agricole est de plus en plus l'apanage des sociétés étrangères, en ce qui concerne par exemple les tracteurs, les tronçonneuses et les moissonneuses). Mais le "gel des terres ", c'est-à-dire, de la part de Bruxelles, l'interdiction momentanée de cultiver, et les incertitudes de la PAC, font que la production et l'investissement dans ce domaine, restent stagnants. Le succès de certaines machines, comme les vendangeuses, a complètement aboli des catégories entières d'ouvriers agricoles saisonniers dans les grandes régions viticoles (Bordeaux, Bourgogne).

L'insémination artificielle a amélioré la sélection des espèces animales. Mais la nourriture des animaux a été bouleversée par le développement des rations alimentaires.

Certains élevages hors-sol, comme celui des porcs, font l'objet de réglementations particulièrement strictes : "L'exploitation porcine est encadrée par des prescriptions techniques drastiques pour l'environnement, s'agissant, entre autres, de la collecte des effluents d'élevage, de la capacité de stockage des lisiers, de la limitation de leur utilisation comme engrais et des nuisances au voisinage. (...) La profession (...) est engagée dans des actions préventives et curatives en faveur de l'environnement, comme en témoigne l'implication des éleveurs au côté des pouvoirs publics dans le Programme de Maîtrise des Pollutions d'Origine Agricole (PMPOA). (...) ce programme est freiné actuellement " (Luc Guyau, Le Monde  du 3.11.1998).

Dans des cas comme celui-là, les contraintes de l'environnement d'une part, la volonté de maintenir l'élevage dans une région déterminée alors que la consommation regarde l'ensemble du territoire de l'autre, se heurtent à ce qu'on appelle aujourd'hui le développement durable ou soutenable, précédemment évoqué, qui tend à harmoniser la production au milieu où on l'implante. L'élevage du porc en est l'un des exemples les plus criants.

Cet appel aux fonds de l'Etat s'inscrit bien évidemment dans le cadre du protectionnisme, puisqu'à la différence de la viande bovine, la viande de porc n'a jamais été considérée que comme une extension de la production végétale. La France mais aussi l'Europe, jouent ici sur la régionalisation qualitative de la production en limitant d'un côté "le développement du porc hors de Bretagne " (la Bretagne assure 52% de la production nationale), et en faisant passer, de l'autre, certains produits, comme le jambon de Bayonne (en Pays basque) sous le label "indication géographique protégée ".

Cette insistance sur la productivité n'a pas été sans inconvénient pour la terre et la santé des hommes et des animaux. La crise de "la vache folle" est suffisamment connue pour qu'on n’ait pas besoin de s'y arrêter longuement. Aux dires du ministère de l'Agriculture, la maladie est en régression sur le territoire français. Aux dires du ministère de la Recherche, elle s'étend à d'autres espèces animales, comme les moutons. Elle est passée du domaine agricole au phénomène de société, comme en témoignent ces phrases tirées de Vert de colère, l'une des dernières chansons de Pierre Perret (1998), un chansonnier à la fois gourmet et gourmand, sensible aux habitudes alimentaires de ses concitoyens (sa chanson Le Tord-boyaux , type du restaurant de banlieue à la fois attrayant et équivoque, a été un succès dans les années soixante):

"Les moutons mang' leurs papas

Changés en granulés.

Les déchets ultimes

La vach' folle en prime

Sont un petit cadeau du ciel

De nos industriels ".

 

En ce qui concerne la production "culturale " (le terme tend à remplacer l'adjectif "agricole", qui devient ici désuet) les laboratoires de l'INRA ont sélectionné les semences des céréales (maïs, blé). Fongicides et herbicides, désherbants et engrais ont accru la productivité à l'hectare des semences. L'irrigation par canaux et par aspersion s'est répandue. On est passé  dans les années cinquante de la culture du maïs normal à celle du maïs hybride plus résistant aux climats froids, pour arriver ces dernières années au maïs transgénique (appartenant aux OGM, Organismes Génétiquement Modifiés).

Mais les défauts de cette politique de productivité se font sentir.

On aboutit d'abord à une dépendance croissante de l'agriculture par rapport aux autres branches de l'industrie (chimie, par exemple); à tel point qu'on privilégie une agriculture et un élevage hors-sol (élevage des volailles, notamment). Les ressources en eau diminuent (les nappes phréatiques s'épuisent). Les écologistes dénoncent l'usage irraisonné des fertilisants. Aujourd'hui, les grands céréaliers essaient de doser l'emploi de l'eau et des engrais en fonction des besoins exacts de la plante. Les OGM sont remis en question par les écologistes et les organisations de consommateurs.

L'endettement est devenu une plaie pour les paysans. On estime environ à 10% des agriculteurs en France le chiffre de ceux qui ne parviennent pas à honorer leurs dettes envers les banques (Crédit agricole notamment). Un Fonds d'allégement de la dette agricole (FADA) a été mis en place par le Crédit agricole ces dernières années. Enfin, comme écrivait Fernand Braudel au début des années 1980, "les paysans de l'Ancien Régime travaillaient pour leur Seigneur; les agriculteurs d'aujourd'hui travaillent pour payer les dettes contractées au moment de l'achat du matériel ".

 

II. e. Les régions agricoles

 

La France est un pays qui est passé d'une grande diversification des cultures végétales sur l'ensemble du territoire à une politique de spécialisation par région. Sa SAU (Surface Agricole Utilisable) la plus grande d'Europe lui a permis de pratiquer pendant longtemps une agriculture extensive. Aujourd'hui, la concurrence des pays européens et des pays tiers, le modèle fourni par les autres agricultures, entraînent la production à devenir intensive. L'Economie paysanne, qui a régi la France pendant l'Ancien Régime et jusqu'à la première moitié de ce siècle, s'est en quelque sorte adaptée aux nécessités actuelles, jusqu'à devenir le domaine de l'agro-alimentaire. De ce point de vue, la région Bretagne est emblématique. La Bretagne est l'une des régions qui a le moins souffert de l'exode rural; elle a su reconvertir son agriculture grâce aux petites et moyennes sociétés agro-alimentaires. Traverser la France en allant du sud-est vers l'ouest signifie passer de la France agricole à la France agro-alimentaire.

 

Les différents types de production végétale se répartissent comme suit :

- la grande culture intensive  (céréales, betteraves à sucre, oléagineux : tournesol, colza et soja) dans le Centre-Nord : en Flandre, Picardie, Champagne, Beauce et Brie;

- les cultures fourragères en association avec l'élevage dans l'Ouest : Bretagne, nord du pays de Loire;

- l'agriculture mixte (céréales, cultures fourragères, élevage) : Poitou Charente, Languedoc, Aquitaine, Nord du Bassin Parisien, ainsi que dans le Nord-Est : Vosges, Alsace et Lorraine, et le Centre-Est : Bresse, Nord du Rhône;

- les cultures maraîchères, fruitières et florales, plus spécialement en Provence, en Corse (oranges et agrumes en général) et dans le Rhône, mais aussi le long de la Loire, en Aquitaine, et en Bretagne pour certaines productions (pommes à cidre, artichauts).

Dans le domaine maraîcher, on distingue deux types de production : la production pour l'auto-consommation familiale, difficilement quantifiable mais importante, et la production de plein champ, souvent intégrée à la polyculture.

- les vignobles de vin de table (Languedoc), et ceux de vins AOC (Appelation d'Origine Contrôlée) : Champagne, Bourgogne, Bordeaux, Pays de Loire; une nouvelle catégorie, à mi-chemin entre les vins AOC et les vins de table, est constituée par les vins de pays. Le but des viticulteurs étant souvent de passer d'une catégorie à l'autre, celle-ci constitue une catégorie intermédiaire;

- les zones de pâturage permanent, consacrées à l'élevage, comme la Normandie, les Pyrénées, le Massif Central, la Savoie;

Une mention particulière est à réserver à certaines micro-régions, comme la Camargue, où l'on produit du riz; à la forêt des Landes (bois et résineux), au Périgord (truffes), ainsi qu'aux régions productrices de bière (Alsace) et d'alcools : Cognac (Charente) et Armagnac.

En ce qui concerne les différentes productions, les céréales les plus cultivées sont le blé, l'orge et le maïs. Mais la France est fortement concurrencée dans ce domaine par les Etats-Unis.

Parmi les produits sucriers, la betterave à sucre est présente en territoire métropolitain et sa production concerne aussi bien les planteurs de betteraves que les raffineurs; il faut compter aussi la canne à sucre, dont la production tend à la baisse dans les îles des Antilles (où elle sert à fabriquer le rhum); l'aide de l'Etat la maintient à la Réunion, où elle intéresse essentiellement les petits planteurs qui assurent 200.000 tonnes de sucre chaque année, et 70% des exportations de l'île. "La France est le premier producteur mondial de sucre de betterave et se situe au 7 ème rang mondial en comptant la production de sucre de canne. Il y a en métropole 42 sucreries, appartenant notamment à Eridania Beghin-say, Saint Louis Sucre, Vermandoise Industries " (Le Monde, 4 mars 1999).

La production des vins de table  est en baisse également, malgré les efforts des producteurs languedociens. En revanche, les vins AOC (Appelation d'origine contrôlée) résistent bien en dehors de toute définition des prix. La région Alsace fonde sa production agricole sur le double marché des vins AOC et de la bière.

Dans l'ensemble, les régions productrices de vin AOC sont les seules régions qui ont su maintenir à travers le temps la constance de leurs productions, Cognac, Bourgogne et Bordeaux ayant été assurées, dès le départ, d'un marché international (à l'origine, Cognac et Bordeaux fournissent les tables d'Angleterre ; la Bourgogne  celles des pays du nord de l’Europe).

Pourtant, la concurrence est forte. Le cognac, qui prend son nom de la ville des Charentes, voit sa production viticole partiellement déclassée en vin de pays en raison de la concurrence que lui font en France des alcools comme le whisky. La ruse des producteurs consiste alors à commercialiser des long-drinks (cognac-vodka, bière au cognac) qui sont d'abord expérimentés sur les consommateurs britanniques, en attendant d'être vendus dans les supermarchés de l'Hexagone. Par contre, les vins de Bordeaux sont l'objet d'une spéculation effrénée de la part des grands groupes agro-alimentaires et autres, qui rachètent les propriétés  en profitant parfois des dissensions à l'intérieur des familles. Mais les retombées de certains "événements" comme le réveillon de l'an 2000 ne sont pas non plus étrangères aux calculs des viticulteurs. Des producteurs viticoles des Charentes, à cet effet, ont mis en bouteille d'excellents vins qu'ils ont immergés au large de la Vendée, pour retrouver la tradition du "vin de mer " dont les commerçants du XVIIe et XVIIIe siècles étaient amateurs.

Rappelons tout de même que la consommation des produits végétaux et animaux ne se résume pas à la production métropolitaine; l'alimentation est suffisamment diversifiée en ce domaine pour faire appel aux cultures des autres pays et des autres continents.

 

 

 

 

II. f. La production animale

 

Les zones d'élevage sont les régions laissées libres par l'agriculture spécialisée. L'élevage bovin pour le lait se concentre surtout en Savoie, en Franche-Comté (au-dessus du lac de Genève), et en Normandie; l'élevage bovin pour la viande dans le Massif Central - les éleveurs y sont surtout des "naisseurs ", c'est-à-dire qu'ils élèvent les vaches et vendent les veaux, sur le marché français mais aussi italien et espagnol, pour être engraissés par d'autres éleveurs dits "d'embouche "; l'élevage bovin pour le lait et la viande en Bretagne et dans le pays de Loire; la Corse, les Alpes du Sud et le sud du Massif Central (les Causses) connaissent un important élevage ovin et caprin (moutons et chèvres). Les porcs sont surtout élevés dans le nord du pays (en Flandre) et en Bretagne, tout comme la volaille (35% de la production nationale).

 

II. g. Les industries agro-alimentaires (IAA)

 

Les IAA concernent essentiellement la transformation des produits agricoles par 2 types d'industrie :

- d'abord, les industries agricoles, qui travaillent les produits bruts fournis par l'exploitation : par exemple, le blé est transformé en farine. Les investissements sont coûteux (minoteries, sucreries). La marge de bénéfice est réduite, et d'autant plus réduite pour les agriculteurs eux-mêmes. La production de sucre se divise notamment entre les producteurs de betteraves et les raffineurs.

- ensuite, les industries alimentaires; cette seconde transformation aboutit aux produits préparés et prêts à être consommés. Les bénéfices sont plus importants.

Les IAA sont le premier secteur industriel français, et emploient près de 400.000 actifs; leur solde est excédentaire, mais la "restructuration" de ces dernières années les a frappées également, en raison du recul des prix  et de la stagnation de la consommation intérieure.

Les industries alimentaires ont été stimulées ces dernières années :

- par la modification des goûts alimentaires et surtout par les grandes surfaces (grands super-marchés), qui présentent des produits sous emballage calibrés en fonction des demandes : fruits, légumes, etc. Les plats cuisinés, les vins AOC et les fromages frais connaissent par exemple un véritable boum. Les produits de luxe, comme le saumon, le foie gras, et le vin, sont à la fois banalisés par la vente dans les grandes surfaces, et objet, nous l'avons vu, de la convoitise des grands groupes;

- par les contraintes économiques : les produits surgelés bénéficient de la présence simultanée dans les foyers des congélateurs et des fours à micro-ondes; le fait que dans une famille homme et femme travaillent entraîne la consommation des aliments "prêts à consommer ", depuis les potages en sachet aux filets de poisson en passant par le café en poudre. La pomme de terre s'est particulièrement bien maintenue, grâce aux chips d'abord, puis à la purée en flocons et enfin aux frites précuites. En témoignent les articles qui lui sont consacrés régulièrement dans les journaux, comme celui-ci : "Le Nord-Pas-de-Calais est le plus gros producteur de pommes de terre de consommation : 1,9 million de tonnes sur 40 500 hectares, soit près du double de la Picardie. Toutefois, cette dernière arrive en tête pour l'approvisionnement des industries de la fécule.

Il s'agit, en fait, de deux métiers différents. La production féculière rapporte moins, mais est moins risquée que la pomme de terre de consommation. (...) Quant aux recherches variétales, elles apportent sans cesse de jeunes concurrentes de la célèbre bintje, en fonction des exigences des techniciens et de la mode. Les uns veulent de beaux volumes oblongs pour les longues frites des fast-food; d'autres une belle peau, facile à laver " (Le Monde, 2 mars 1999).

- par la restauration collective : Campanile et Novotel se disputent la restauration commerciale, tandis que Mac Donald s'est emparé de la restauration rapide (fast food); grilladeries et cafétérias accompagnent généralement les grandes surfaces et les chaînes hôtelières.

 

II. h. L'organisation des IAA.

 

- Les coopératives se sont implantées surtout dans l'industrie laitière; pendant longtemps, l'Union Laitière Normande (ULN) représente le fer de lance des coopératives agro-alimentaires; le principe des prix garantis lui assure de bonnes rentes de position; l'introduction des quotas laitiers en 1984 l'oblige à privilégier des produits à plus forte valeur ajoutée comme les yaourts et l'emmenthal (en France, l'emmenthal et le gruyère font partie de l'alimentation de base comme en Italie le "parmigiano"); mais ces produits sont soumis à une concurrence effrénée, et l'ULN est rachetée par le groupe privé Bongrain; pour les volailles, nous avons la coopérative UNICOPA;

- Le secteur industriel. La plupart des entreprises agro-alimentaires appartiennent aux PME (Petites et Moyennes Entreprises); elles sont souvent soumises à des entreprises plus grandes appartenant quant à elles au secteur de la distribution.

- Le secteur financier. Les IAA se sont dotées en 1980 d'une structure financière de capital-investissement, l'IDIA (Institut des industries agricoles et agroalimentaires). Cette structure est rachetée en 1998 par le Crédit agricole qui détient 26% de son capital. L'IDIA investit dans tous les domaines de l'agro-alimentaire, sans en privilégier aucun en particulier.

 

II. i. Les stratégies

 

La diversification est une des ressources de certains industriels, présents au départ dans le domaine du luxe. Le groupe LVMH (Louis Vuitton Moët Hennessy), présent d'abord dans la maroquinerie, a ensuite distribué son activité dans le champagne (Moët) et dans le cognac (Hennessy), ainsi que dans les vins étrangers (californiens et australiens). Il est maintenant entré dans le vin de Bordeaux, après le rachat des parts de la famille du comte de Lur-Saluces dans le domaine de Château d'Yquem (1.000 Francs la bouteille pour une bonne année). De plus, son PDG, Bernard Arnault, s'est associé au milliardaire belge Albert Frère dans le domaine de Cheval Blanc (Saint-Emilion). Cette stratégie est aussi celle de François Pinault, propriétaire du Printemps, de La Redoute et de la FNAC (Fédération nationale d'achat des cadres), et l'une des plus grosses fortunes de France. Sa nouvelle propriété de Château Latour lui rapporte un bénéfice pudiquement représenté par le chiffre de 5%, sur un chiffre d'affaire (CA) de 80 millions de Francs, en forte augmentation.

Certains secteurs choisissent une position de force. C'est le cas de Danone (1er groupe national, 4ème européen et 8ème mondial) dans les produits laitiers; de Pernod-Ricard dans les apéritifs et le "pastis", boisson alcoolisée à base d'anis, populaire dans le midi de la France sous le nom de "pastaga". Pernod-Ricard est le produit de la fusion des deux sociétés qui se disputaient le marché de ce produit.

 

II. j. Quelques grands groupes agro-alimentaires

 

Le tableau qui suit présente le Chiffre d'Affaires (en millions de francs) pour l'année 1997 de quelques groupes spécialisés dans la production alimentaire, et choisis dans des régions différentes. Malgré la politique de décentralisation, on constate que le siège social des groupes ou des sociétés dont le CA est le plus élevé se trouve encore en Ile de France (Paris, Neuilly s/Seine) (source : L'Entreprise, décembre 1998).

 

Groupe

Secteur

Localité CA 1997 Revenu Net
Danone Alimentation Paris 88 476 3664,0
Eridania Beghin-Say Agro-Industrie Neuilly s/Seine 63 650 1904,0
Pernod-Ricard Boissons Paris 19 049 1354,0
Fromageries Bel Produits laitiers Paris 9 280 404,2
Taittinger Champagne Reims 4 221 97,0
Veuve Clicquot-Ponsardin Champagne Reims 1 137 291,0
William-Saurin Alimentaire Lyon 3 295 157,7
Rivoire & Carret Alimentaire Marseille 1 379 10,2
Jean Stalaven Charcutier-traiteur St-Brieuc- Bretagne 931 9,0

 

 

 

La stratégie consistant à privilégier les secteurs a abouti, pour certains groupes, en particulier Danone, à rafler le maximum de marques dans le domaine de l'agro-alimentaire, alors que sa production de base était les produits laitiers. Ce groupe, sous l'égide d'abord de son directeur et principal actionnaire Antoine Riboud, puis de son successeur et fils Franck Riboud, possède les marques suivantes, qu'il a eu soin de laisser à leur nom : bières (Kronenbourg, Kanterbraü); condiments (Amora, Maille); biscottes (Heudebert); pâtes alimentaires (Panzani, Agnesi); biscuits (Belin, Lu, l'Alsacienne); eaux plates (non gazeuses : Evian, Volvic); produits frais (Gervais-Danone); confiserie (La Pie qui chante, Vandamme); confitures (Materne, Lenzbourg, Lerebourg). Toutefois, la tendance aujourd'hui consisterait à unifier le groupe sous le seul nom de Danone, pour économiser en frais de publicité.

Exemple d'accord agro-alimentaire qui a rempli d'aise le cœur des Français : "Franck Riboud, le patron de Danone [...], après avoir investi plus de 50 millions de francs pour être le partenaire "produits frais" du Mondial de foot, vient d'arracher le droit de vendre de l'eau d'Evian dans les buvettes des stades. Ce n'était pas gagné d'avance. Coca-Cola avait payé plus de 150 millions de francs à la Fédération Internationale de football, pour que ses sodas et jus de fruits (Minute Maid) soient les boissons exclusives de la Coupe du monde 1998. Douglas Ivester, le nouveau président de la firme d'Atlanta, a fini par céder. Il faut dire que les deux entreprises entretiennent de bonnes relations : Coca est un des distributeurs d'Evian aux Etats-Unis, tandis que Danone fabrique le Minute Maid Premium en Europe. Mais Coca ne lâche pas tout. Evian n'aura pas le droit de vanter sa présence au Mondial dans ses publicités " (Capital, n°76, janvier 1998).

Pour la petite histoire, Antoine Riboud est le frère du photographe antimilitariste Marc Riboud, qui a sensibilisé l'opinion publique mondiale en photographiant le mouvement hippy américain contre la guerre du Vietnam dans les années 60. Les yuppies ne sont pas loin.

Parmi les autres grands groupes spécialisés dans un secteur, il faut citer Bongrain, qui réalise la moitié de son chiffre d'affaires à l'étranger. La plupart des fromages à pâte molle (Caprice des dieux, Chamois d'or, Belle des champs), lui appartiennent, envahissant aujourd'hui le marché italien, spécialisé traditionnellement dans les fromages à pâte dure.

Cette bonne situation encourage aussi l'implantation en France de nombreuses sociétés étrangères. C'est le cas des géants Nestlé (qui possède pour l'heure Chambourcy, Gloria, Guigoz, Vittel et Perrier) et Unilever.

II. k. Autres secteurs de l'agro-alimentaire 

 

Parmi les produits laitiers, le beurre recule (on apprécie cependant encore le beurre salé de Bretagne) et les fromages sont en progression. On mentionnera pour mémoire, outre le groupe Bongrain déjà cité, le groupe Besnier, du nom de son propriétaire, surnommé le roi du camembert et l'ogre des fromages, qui a racheté la Société des Caves de Roquefort (du nom d'un village des Causses qui produit ce fromage de brebis) à... Nestlé!

La viande est la deuxième IAA française par son CA, - les Français consomment une moyenne de 35 kg de porc par habitant et par an, sous forme essentiellement de charcuterie. Le circuit vif (bétail abattu sur les lieux de consommation) a cédé la place au circuit mort. La filière de la viande permet aux steaks d'arriver directement hachés chez votre boucher (ou directement chez vous grâce au développement des distributeurs de produits surgelés). Le principal groupe est SOCOPA (Société omnium de conditionnement de produits agricoles), présent surtout dans l'Ouest.

 

Aujourd'hui, l'agriculture et la politique qui la soutient changent de visage. Il ne s'agit plus d'une politique indiscriminée de prix garantis en fonction de la culture pratiquée, mais d'une aide particulièrement ciblée en fonction des agriculteurs eux-mêmes. Enfin, cette politique détermine également des changements dans la stratégie suivie entre autres par le CNJA (Centre national des jeunes agriculteurs), comme l'explique Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture :

"Les agriculteurs doivent prêter attention plus à la compétitivité des exploitations qu'à leur productivité (...) plutôt à la marge que dégage leur activité qu'au volume de production qui en résulte". Et cette compétitivité "tiendra plus à sa capacité de différenciation des produits sur des marchés de plus en plus segmentés qu'à sa compétitivité sur le prix des produits standards de masse " (Le Monde  21-22 juin1998).

Pourtant, malgré ce réajustement et l'élévation du niveau de vie des agriculteurs (corollaire sans doute de leur diminution en nombre), les disparités géographiques restent fortes :

"Par rapport à une moyenne 100, les exploitations de Champagne-Ardennes sont à 193 et d'Ile-de-France à 172, le Limousin ne dépasse pas 40, la Basse-Normandie 62 et Midi-Pyrénnées 76. Le ministre de l'agriculture, Louis Le Pensec, s'est ''réjoui'' de ces évolutions mais ajoute que les disparités rendent urgente une politique vigoureuse de rééquilibrage, par exemple à travers la future loi d'orientation " (Le Monde, 28 mai 1998).

 

II. l. La pêche et les régions maritimes

 

Si la France a un ministère de l'agriculture depuis 1881, elle a attendu cent ans pour avoir un ministère de la mer. Les enjeux dont la mer est l'objet sont à la fois économiques, alimentaires et environnementaux. Plus que les autres, les ressources maritimes sont internationales, et c'est en termes de régions maritimes (Arc Atlantique, du Portugal à l'Irlande, Iles, Méditerranée) qu'il faut évaluer ces enjeux, et les ressources.

En France, 3 types de pêche se partagent le poisson :

- la petite pêche, dont les bateaux n'excèdent pas 12 mètres et font des sorties fréquentes, sans s'éloigner des côtes. Les pêcheurs sont rémunérés à la part, après paiement des frais de manutention;

- la pêche hauturière, au chalut (espèce de filet) et en haute mer, étalée sur un ou plusieurs jours;

- la grande pêche, avec navires-usines qui traitent et préparent le poisson à bord, et dont les sorties peuvent durer des mois. Dans ces deux derniers types de pêche, les marins reçoivent un salaire fixe.

Mais les problèmes, comme la raréfaction de certaines espèces (morues, daurades, merlans, lieus noirs); la nécessité d'en trouver d'autres, comestibles, à de plus grandes profondeurs; le fait que certaines zones se dépeuplent alors que d'autres sont plus prolifiques que jamais (s'il faut en croire Robert Delort et son très riche livre, Les animaux ont une histoire, où il consacre un chapitre aux rapports de l'Occident et du hareng), ce qui entraîne la concurrence d'autres pays; tout cela place la Communauté Européenne d'abord, l'Union Européenne ensuite, en situation d'intervenir, aussi bien pour réparer les dégâts causés au patrimoine par les manifestations de pêcheurs à Rennes, en Bretagne, il ya quelques années, que pour réglementer les techniques de pêche, puisque la Commission condamne les nuisances provoquées à la faune en général et au renouvellement des espèces pêchées en particulier, par les FMD (Filets à mailles dérivants). Dans l'Europe Bleue  qui a été mise en place, la France n'est pas le plus en règle des partenaires, et la pratique des aides est remise en question ces derniers temps.

Aussi certains organismes de contrôle et de recherche sont-ils créés. L'Ifremer (Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer), en compagnie de ses homologues européens, met au point un type de filet pour laisser la vie aux jeunes poissons. La surpêche (capture dans les filets des poissons hors-normes) est en effet une des causes principales de la disparition des espèces.

Voici d'ailleurs comment la France vit ses rapports avec ses partenaires européens : "Après des négociations difficiles, les ministres européens chargés de la pêche ont trouvé mardi 15 avril un compromis sur la réduction des captures de poisson. Ce que les experts appellent "l'effort de pêche" sera réduit de 30% d'ici à 2001 pour les espèces les plus "menacées" et de 20% pour les stocks considérés comme "surexploités".

La France, par la voix de Philippe Vasseur, et le Royaume Uni ont voté contre, estimant ces réductions excessives. Les Etats pourront soit réduire leurs flotilles, soit limiter le temps des sorties en mer. Les bateaux côtiers de moins de 12 mètres sont exonérés de ces mesures. Cet accord permet le déblocage par la Commission des fonds européens prévus pour la reconversion des activités et des régions où la pêche est en crise. La France et l'Espagne sont attributaires d'importants crédits à ce titre " (Martine Valo, Le Monde)

Si le monde de la pêche est bien desservi par un arrière-pays qui va du mareyeur qui se fournit à la criée à l'arrivée du bateau, jusqu'aux 10.000 poissonniers (mais les Français font la moue devant le poisson; ils n'aiment plus que les espèces "nobles" et les coquillages: oursins, mais surtout moules et huîtres, élevées par des conchyliculteurs dans des concessions cédées par l'Etat, à Arcachon ou à Cancale), les marins-pêcheurs sont soumis à la concurrence dont profitent les IAA qui préfèrent s'approvisionner sur les marchés étrangers en raison des prix moins élevés. La pêche doit donc devenir une industrie à part entière. Le marin vendéen ou le germonier (le germon est le thon blanc, le germonier celui qui le pêche) de l'Ile d'Yeu pêchent ainsi dans l'Atlantique, font subir au thon un premier traitement dans les pêcheries du Maroc, et l'apportent enfin à Boulogne pour les dernières opérations. Pour sensibiliser aux problèmes de la mer et de la pêche, d'un point de vue scientifique, la ville de Brest a ouvert Océanopolis, un centre de recherche, d'éducation et même de loisirs (on peut s'y promener et caresser des animaux marins!), placé sous la direction d'Ifremer. En attendant que l'aquaculture remplace la pêche (les cycles de la truite et de la crevette sont pourtant bien dominés), les tempêtes s'abattront encore sur le pont des bateaux du Guilvinec, l’un des derniers ports de pêche bretons.